Brett Houghton, figure emblématique du kayak-polo

Brett Houghton, figure emblématique du kayak-polo

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Aujourd’hui entraineur de l’équipe australienne masculine de kayak-polo, Brett Houghton a longtemps marqué ce sport par ses exploits sportifs. Trois fois champion du monde dans les années 90, il est aussi l’inventeur du Change up une technique d’attaque redoutable pour les gardiens de but. Entretien avec Brett Houghton, la sagesse au fil de l’eau.

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Brett Houghton s’est retiré de la compétition internationale, mais joue toujours pour son club dans le New South Wales (Nouvelle Galles du Sud)
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Crédit photo Australian Canoeing)

Kayak-polo.info : Vous faites du kayak-polo depuis l’âge de 12 ans, qu’est-ce qui vous fascine dans ce sport?
Brett Houghton
: J’imagine que c’est le côté très actif et complet de ce sport. Vous devez vous déplacer vite et il faut mettre en valeur une compilation de différentes compétences : pagayer et gérer la balle en même temps. Ce sport implique de voyager beaucoup aussi, se déplacer hors d’Australie et profiter des voyages à l’international, notamment en Europe où l’on a toujours reçu un accueil chaleureux.

KPI : Vous êtes célèbre pour être à l’origine du « change up » (*1), est-ce votre marque de fabrique personnelle ou tous les joueurs maintenant connaissent cette parade ?
BH :
Non pas tous les joueurs! Mais oui c’est vrai que c’est devenu une parade connue… Pendant les années 90 pas beaucoup de gardiens de but pouvaient arrêter ce tir. C’était plutôt efficace nous avons mis plusieurs buts comme ça ! Maintenant, les gardiens sont beaucoup plus préparés sur ce genre d’effet sur la balle. Ils ont une meilleure technique. Et puis leur équipement a beaucoup changé aussi… leurs pagaies sont plus légères. Ils bougent plus vite et peuvent revenir sur leur position plus rapidement. Mais malgré cela, le “change up” est toujours une bonne parade ! (Rire)

KPI : Le kayak-polo n’est pas très populaire en Australie au contraire du rugby, du cricket ou du footy (Ndlr: football australien, sorte de rugby à 18), pourquoi ?
BH : Ah… Je pense que c’est juste parce que pour les Australiens le water polo n’est pas un sport qu’ils ont l’habitude de voir pratiquer sur l’eau…malgré son nom! (Rire). C’est pas quelque chose de commun. Au rugby, cricket ou footy vous avez juste besoin d’avoir un parc pas trop loin et vous pouvez jouer. Le kayak-polo est un sport qui demande plus de contraintes je suppose. Vous devez avoir accès à un plan d’eau, être à l’aise dans l’eau et dans un bateau et puis ne pas avoir peur de la balle ! Cela demande plus d’efforts et d’investissements que tous ces autres sports.

KPI : Depuis combien de temps l’équipe masculine australienne de kayak-polo s’entraine-t-elle pour les championnats du monde de Thury-Harcourt en France?
BH : Nous avons commencé en septembre l’an dernier avec une équipe qui comptait 18 joueurs. En avril de cette année ils n’étaient plus que huit. Trois sont originaires du New South Wales (Nouvelle Galles du sud), quatre sont du South Australia (SA) et un du Victoria (VIC). La sélection s’est faite durant l’été (Ndlr: en Australie l’été se concentre d’octobre à mars) avec cinq compétitions basées sur les compétences, le physique et le club qu’ils représentaient.

PictureKPI : A quel âge un joueur de kayak-polo doit se mettre en retraite?
BH : Oh…Il n’y a pas d’âge vraiment. En ce qui me concerne je me suis retiré de la compétition quand j’avais 29 ans. Mais même à mon âge je joue toujours pour l’équipe du New South Wales ! (Rire)

 

KPI : Quel est l’âge moyen de l’équipe masculine actuelle?
BH : Hum…. le plus âgé a 37 ans et le plus jeune environ 24 ans. Nous apprécions avoir des joueurs plus âgés, c’est essentiel pour les compétitions internationales car nous pouvons compter sur leur expérience, ce que les jeunes joueurs ne possèdent évidemment pas. L’Australie est loin de l’Europe qui concentre la majorité des meilleurs joueurs du monde. Ca coûte cher de se rendre là-bas… c’est tout le problème!

KPI : L’équipe australienne masculine de kayak-polo dont vous faisiez partie dominait largement les autres équipes internationales pendant toute la décennie 90 (*2), que s’est-il passé depuis ?
BH : Cela s’explique en partie par le nombre de jeunes et nouveaux joueurs qui ne cesse de diminuer. Les jeunes sont le futur du kayak-polo. Ils développent ce sport. Nous sommes actuellement dans une mauvaise posture… même chose du côté de l’Angleterre d’après mes contacts là-bas. Mais en Europe de façon générale, la situation est plutôt bonne, ils ont des équipes structurées qui deviennent de plus en plus fortes.

KPI : Quel est le point fort et le point faible de l’équipe masculine australienne ?
BH :
Je pense que leur point faible est aussi leur point fort ! Nous n’avons pas l’habitude de jouer au niveau international. Cela veut dire que nous avons besoin d’un certain ajustement et de plus de pratique. Mais cela veut aussi dire que les autres équipes notamment Européennes ne sont pas très familières avec notre façon de jouer, ce qui est un net avantage !

KPI : Vous étiez le capitaine de l’équipe Australienne il y a une quinzaine d’années, quel est le meilleur conseil que vous pourriez donner à l’actuel capitaine Craig Hutchinson ?
BH :
Ah, ah..(Rire). Clairement d’être patient! Craig a une expérience de l’Europe, il a voyagé à plusieurs reprises là-bas. Il sait comment gérer tout ça : vous savez être en tournoi, être loin de la famille et des amis. Le support de la famille est essentiel surtout dans notre sport. Evidemment pas seulement d’un point de vue financier mais aussi pour le temps qu’elle nous consacre, en bénévole.

KPI : Que pensez-vous de l’équipe française ?
BH :
Ils sont incroyablement constants dans leurs résultats depuis ces dix dernières années. C’est vraiment un collectif fort et soudé. Je suis très impressionné.

KPI : Avez-vous connaissance de la technique de jeu de l’équipe française ?
BH :
Oui ! Nous avons regardé plusieurs vidéos. Nous connaissons leurs faiblesses et une bonne partie de leurs techniques. Nous sommes prêts à disputer un match contre eux !

KPI : Avez-vous déjà été en France ?
BH : Oui… On arrivera d’ailleurs suffisamment en avance pour les championnats du monde, on atterrit le 2 septembre.

KPI : Envisagez-vous de faire un peu de tourisme une fois à Thury-Harcourt ?
BH : Oui bien sûr! Etre en France sans faire de visites? Je pense que nous allons nous balader dans la région, on va s’arrêter pour voir le Mont-Saint-Michel et les célèbres plages du Débarquement. La Normandie est vraiment un très bel endroit, on a de la chance !

KPI : Quel est l’état d’esprit de l’équipe australienne ?
BH : Nous essayons d’organiser des week-ends d’entrainement afin de pouvoir passer un maximum de temps tous ensemble. L’idée est d’avoir une véritable cohésion de groupe. Mais de façon générale ils sont très confiants. Ils ont l’habitude de jouer ensemble. Certains joueurs se connaissent depuis au moins quatre ans… ou depuis Poznan en 2012. Nous avons seulement deux nouveaux dans notre équipe.

KPI : Qu’est-ce qui est arrivé à l’équipe féminine ?
BH : Ah…C’est une grande déception. C’est la première fois depuis les championnats en 1994 que l’équipe féminine australienne ne participera pas aux championnats du monde! La principale raison c’est que le ticket pour la France est trop cher pour certaines des joueuses, sans parler de toutes les dépenses sur place… Elles ne peuvent pas assumer un tel coût financier. (Ndlr: voir interview avec la joueuse Nikky Lee). Mais elles seront là pour 2016 !

KPI : Qu’est-ce que vous voulez dire par “assumer un tel coût financier”, vous ne recevez pas d’aides financières ?
BH : Non. Absolument rien ! Malheureusement la fédération australienne de kayak ne nous aide pas. Ils supportent le slalom, la descente et la course en ligne. Tout l’argent pour les billets d’avion, l’équipement et les autres dépenses journalières, c’est de notre poche !

KPI : Slalom, course en ligne, ces deux disciplines sont représentées aux Jeux Olympiques, est-ce votre but aussi avec le kayak-polo ?
BH : Absolument! Peut-être pas les prochains Jeux Olympiques mais ceux d’après. J’en suis convaincu. C’est clairement une opportunité que nous envisageons pour le futur.

KPI : Si l’équipe d’Australie l’emporte avec une médaille d’or, quelles seront les premières choses que vous feriez ?
BH : Probablement sauter dans l’eau…(Rire) Appeler mes proches et avoir une longue conversation avec eux et puis après fêter cela comme il se doit
!

Propos recueillis et traduits de l’anglais part Isabelle Robert

(*1) Le change up est un effet que le joueur face au gardien de but donne sur la balle. Celle-ci semble arriver vite mais c’est tout le contraire. Un leurre en somme.

(*2) Duncan Cochrane, Steve Reid and Scott Makin étaient les autres membres phare de l’équipe de Brett Houghton dans les années 90. Ensemble ils ont formé l’une des plus dynamiques et victorieuses équipes australiennes de canoë kayak lors de compétitions internationales.

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